LA CONTREFAÇON DE BREVET EN FRANCE : SANS CONTREFAÇON !

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Le brevet est depuis longtemps protégé par le droit français, il représente une branche importante de la propriété intellectuelle. Il permet alors à l’inventeur de voir sa création protégée, et lui garantit un monopole d’exploitation pour une durée de 20 ans. C’est pourquoi la contrefaçon de brevet est sanctionnée par le droit français.

Le brevet est une des branches de la propriété intellectuelle qui protège une innovation technique et garantit à son titulaire un monopole d’exploitation pour une durée maximale de 20 ans. Il confère ainsi à son titulaire ou à ses ayants cause un droit exclusif d’exploitation.

Plus précisément, le droit des brevets consiste à conférer un titre de propriété industrielle au déposant, lui garantissant « le droit de jouir de linvention et dinterdire ou dautoriser son exploitation par dautres personnes », comme le rappelle la Compagnie nationale des conseils en propriété industrielle (CNCPI).

Dès lors, la contrefaçon de brevets est définie comme l’atteinte portée aux droits du breveté. L’article L. 615-1 du Code propriété intellectuelle (CPI) énonce en effet que : « Toute atteinte portée aux droits du propriétaire du brevet, tels quils sont définis aux articles L. 613-3 à L. 613-6, constitue une contrefaçon ». Il y a donc en principe contrefaçon de brevet lorsqu’un tiers, qui n’a pas le consentement du titulaire du brevet, exploite de façon directe ou indirecte l’invention telle que définie par au moins une des revendications du brevet.

La contrefaçon de brevet est jugée en France par le tribunal judiciaire de Paris qui décide simultanément de la validité des brevets.

Enfin, il ne peut exister de contrefaçon en France que s’il existe un brevet français ou européen (désignant la France) et que les actes constitutifs de contrefaçon ont été réalisés en France, le brevet étant en vigueur.

En effet, la contrefaçon de brevet est jugée conformément au droit de l’État dans lequel le brevet produit ses effets et où une contrefaçon a été commise. Mais le breveté peut-il efficacement se défendre contre la contrefaçon ? Oui, grâce à l’action en contrefaçon de brevet (1), qui regorge d’ailleurs de quelques subtilités (2).


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I. L’action en contrefaçon de brevet

Les actes constitutifs de contrefaçon (A) sont sanctionnés en France par le Tribunal de grande instance (B).

A) Les actes constitutifs de contrefaçon

Les actes de contrefaçon sont envisagés à l’article L 613-3 CPI.

Ainsi sont prévues comme étant des actes de contrefaçon l’importation, la fabrication de produits, de même que l’offre de produits brevetés en France, la mise dans le commerce ou l’utilisation de tels produits, sont constitutives de contrefaçon directe.

Il en est de même pour l’utilisation d’un procédé breveté, ainsi que pour l’offre, à des tiers et en connaissance de cause, d’un tel procédé.

A l’inverse, est une contrefaçon indirecte, la livraison ou l’offre de livraison, en France, à des tiers non autorisés, de moyens en vue de réaliser ou obtenir l’invention brevetée, lorsque ces moyens spécifiques se rapportent à un élément essentiel de l’invention et qu’il est évident qu’ils permettent de réaliser ou obtenir l’invention. Mais dans ce cas, la preuve de la connaissance de l’acte délictuel doit être rapportée.

Le délit de fabrication consiste dans la réalisation matérielle d’un objet.

Ce délit de fabrication concerne les actes de fabrication du produit contrefaisant sur le territoire français (Loi n° 92-597 de codification du Code de la propriété intellectuelle, 1er juill. 1992, art 4.). Donc, la fabrication en Allemagne par exemple n’est pas punie. La jurisprudence permet de simples actes de réparation à condition qu’ils n’aboutissent pas à la reconstruction du produit breveté (TGI Paris, 9 novembre 2004). En effet, si la réparation du produit couvre l’ensemble des éléments essentiels, il y a donc fabrication et par conséquent contrefaçon. La jurisprudence permet cependant de simples actes de réparation à condition qu’ils n’aboutissent pas à la reconstruction du produit breveté (TGI Paris, 9 novembre 2004).

L’utilisation d’objets contrefaits est le fait de faire usage du produit breveté, sans autorisation et indépendamment de toute fabrication.

L’usage peut alors porter aussi bien sur le produit breveté que sur le procédé breveté, ou encore sur un produit non breveté mais qui a été obtenu par un procédé breveté.

Pour constituer un acte de contrefaçon l’usage doit être effectué à titre commercial, défini comme celui qui permet à la clientèle de jouir de telle sorte que le détenteur des objets contrefaits en retire une source de bénéfice pour son exploitation (Cour cass, 29 avril 1982).

Cependant, il n’est pas nécessaire que l’auteur ait la qualité de commerçant (Cour cass, 15 avril 1964).

Concernant la mise dans le commerce, l’offre en vente et l’exposition de produits contrefaits, la qualité du contrefacteur est indifférente.

En effet, il peut s’agir d’un commerçant ou non.

Peu importe que l’objet contrefait ne pénètre pas en France et soit expédié d’un pays étranger vers un autre, dès l’instant que le contrat de vente a été conclu en France.

En offrant à la vente, le tiers montre qu’il a l’intention de méconnaître les droits du breveté, par conséquent la diffusion de prospectus, de catalogues, ou toute offre accessible sur un site internet accessible en France, constituent des actes de contrefaçon.

La détention d’objet contrefait consiste à détenir le produit contrefait en vue de l’utiliser ou de le mettre dans le commerce.

Concernant la livraison ou l’offre de livraison des moyens de mise en œuvre de l’invention brevetée il n’est pas nécessaire que la livraison porte sur la totalité des moyens de mise en œuvre.

En effet, il suffit que la livraison concerne des moyens se rapportant à un élément essentiel de mise en œuvre.

De même, la fourniture de moyens ne constitue une contrefaçon que dans la mesure où l’offre ou la livraison a eu lieu sur le territoire français et porte sur des moyens mis en œuvre sur le territoire français.

Le délit d’introduction en France d’objets contrefaits s’explique par le principe de la territorialité du brevet.

La contrefaçon est réputée commise par l’importateur mais aussi par le fournisseur étranger qui a participé à l’introduction en France à condition qu’il ait eu connaissance de la destination des produits (TGI Paris, 17 janvier 1989).

Le présumé contrefacteur qui importe ou fabrique en France le produit argué de contrefaçon, peut être poursuivi sans mise en garde préalable. Il en est de même en cas de fabrication ou d’importation en France de produits fabriqués à l’étranger selon un tel procédé.

En revanche, il est nécessaire d’informer de l’existence du brevet au préalable par une lettre de mise en garde, le présumé contrefacteur qui ne fait que vendre, utiliser ou mettre sur le marché les produits argués de contrefaçon, ou qui fournit les moyens permettant la fabrication de tels produits. Ce n’est qu’à partir de la réception de cette mise en garde que la poursuite de ces actes pourra être qualifiée de contrefaçon.

B) Les sanctions de la contrefaçon

La contrefaçon de brevet est jugée en France par le Tribunal judiciaire qui décide simultanément de la validité des brevets.

L’action en contrefaçon engage la responsabilité civile de son auteur et permet au breveté d’obtenir la sanction des actes d’exploitation non autorisés par lui.

En effet, le demandeur à l'action en contrefaçon peut obtenir des mesures provisoires qui permettent de stopper la contrefaçon sans attendre l’issue d’un contentieux souvent long de plusieurs années.

Ainsi, lorsqu’il existe des indices graves de contrefaçon, le Président du tribunal peut, à la requête d'une personne admise à agir en contrefaçon, ordonner en référé au présumé contrefacteur de cesser provisoirement l'activité considérée comme illicite.

Deux types de mesures provisoires sont ouverts pour le demandeur.

D’une part la procédure d’interdiction de contrefaçon de brevet qui permet au breveté d’obtenir du président du TJ saisi du litige, l’arrêt immédiat des actes de contrefaçon jusqu'à la décision finale sur le fond de l’affaire.

D’autre part la retenue en douane des marchandises arguées de contrefaçon.

Si l'action en contrefaçon est reconnue comme fondée, le tribunal condamne le contrefacteur :

- à la cessation définitive de la contrefaçon ; et

- au paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé au demandeur.

L'ordre de cessation peut être assorti d'une astreinte.

Le tribunal peut également autoriser la publication du jugement ou d'un extrait de celui-ci dans un ou plusieurs journaux, aux frais du contrefacteur.

Sur demande de la partie lésée et pour autant que la mesure s'avère nécessaire, le tribunal peut en outre ordonner la confiscation, respectivement la destruction des objets reconnus contrefaits et des instruments, dispositifs ou moyens spécialement destinés à la réalisation de la contrefaçon.

La législation actuelle en vigueur sur les brevets prévoit des sanctions pénales contre la contrefaçon. La confiscation peut être ordonnée en quelque endroit que se trouvent les biens à confisquer, même entre les mains d’un tiers.

La législation actuelle en vigueur sur les brevets ne prévoit cependant pas de sanctions pénales de la contrefaçon.

Enfin, bien qu’assez rare, on notera que la contrefaçon peut également être sanctionnée par une action au pénal.

En effet c’est un délit passible de trois ans d’emprisonnement et 300 000 euros d’amende, les peines sont plus lourdes lorsque ces faits sont commis en bande organisée, sur un réseau de communication au public en ligne, sur des marchandises dangereuses pour la santé, la sécurité de l’homme ou l’animal, ou en cas de récidive, en vertu des articles L 615-14 et L 615-14-1 CPI.  

La responsabilité civile du contrefacteur peut être engagée, des dommages et intérêts pourront être octroyés et évalués selon le préjudice subi par le titulaire des droits et les gains obtenus. De plus, la Cour de cassation a estimé que les mesures de blocage et de déréférencement des sites de streaming ou de téléchargement de contenus contrefaisants devaient être pris en charge par les fournisseurs d’accès à internet et de moteurs de recherche (Cour cass. 1re, 6 juill. 2017).

 

II. Les subtilités de l’action en contrefaçon de brevet

En matière de contrefaçon de brevet, la saisie-contrefaçon opère une saisie réelle des produits ou services présumés contrefaisants (A). En outre, la bonne foi est inopérante (B).

A) La saisie-contrefaçon en matière de brevet

La saisie-contrefaçon est une opération délicate réalisée par un huissier dont le but est d’apporter la preuve de la contrefaçon présumée par une description détaillée des produits ou procédés litigieux, avec éventuellement une saisie réelle.

La Cour de Cassation, dans un arrêt du 1er juillet 2003, a rappelé que les procédures de saisie-contrefaçon en matière de brevet, qui opèrent une saisie réelle, doivent impérativement être suivies d’une action au fond engagée dans les 15 jours à peine de nullité .

En l’espèce, « le titulaire d’un brevet couvrant un système propulsif bi-liquide d’un satellite et l’utilisation de ce système pour assurer l’éjection du satellite » avait fait pratiquer deux saisies-contrefaçon (6 décembre 1991 et 5 mars 1992) estimant que trois satellites acquis par France Télécom par l’intermédiaire du CNES auprès de la société Matra Marconi space reproduisaient les caractéristiques de son brevet. A défaut d’assignation au fond dans le délai imparti, les procès-verbaux comportant les photocopies des documents originaux recueillis dans les locaux du CNES et de la société Matra furent annulés par un jugement du 10 mars 1994.

Puis, à l’occasion de l’acquisition d’un quatrième satellite identique par France Télécom, le titulaire du brevet fut autorisé à effectuer une nouvelle saisie réelle (21 avril 1994), qui permit de récupérer lesdites photocopies auprès du greffe du Tribunal. Pour autant, cette dernière saisie-contrefaçon fut bien évidemment annulée car fondée sur des constats et descriptions eux-mêmes dépourvus de force probante puisque déclarés nuls par le jugement précédemment cité. En cas de saisie réelle, le demandeur a en effet l’obligation d’assigner sous quinzaine le responsable, sous peine de nullité de la saisie-contrefaçon et d’une éventuelle condamnation en dommages et intérêts .

En conséquence, ni le constat, ni le rapport de l’expert réalisé lors de la saisie réelle ne peuvent être utilisés pour établir la contrefaçon, seule la saisie descriptive subsiste .

Cependant si la saisie-contrefaçon est effectuée en cours d’instance, pour sa validation on n’exige pas une nouvelle assignation dans le délai de quinzaine (TGI Paris, 9 juillet 2004).

L’huissier chargé de procéder à la saisie, et dont le choix appartient au saisissant, doit signifier l’ordonnance au saisi.

C’est une copie de l’ordonnance qui doit être remise.

Le défaut de remise de l’ordonnance n’est cause de nullité que dans la mesure où le saisi peut rapporter la preuve d’un préjudice subi en raison de cette omission.

La saisie peut être pratiquée en tout lieu si l’ordonnance le prévoit.

Mais les effets de l’ordonnance sont épuisés par l’exécution de celle-ci.

Le titulaire du brevet est donc sans droit à faire procéder à une nouvelle saisie en vertu de la même ordonnance sinon la deuxième saisie est nulle et n’a aucune force probante.

Toute personne ayant qualité à agir en contrefaçon peut demander une saisie-contrefaçon, en vertu de l’article L 615-5 du CPI. Le titulaire du brevet et le licencié exclusif peuvent agir et demander une saisie-contrefaçon (Cour d’appel de Rennes, 2e ch. com., 24 février 2009). Un nouvel acquéreur de brevet peut demander une saisie-contrefaçon pour des actes antérieurs à l’acquisition du brevet (TGI de Paris, 3e ch., 1re sect., 17 décembre 2015). Le titulaire actuel peut demander une saisie-contrefaçon alors que le brevet en question fait l’objet d’un litige concernant sa titularité (TGI de Paris, 3e ch., 1re sect., 11 février 2016).

B) La bonne foi : inopérante en matière de contrefaçon de brevet

Il est fréquent en matière de contrefaçon de brevet, que le présumé contrefacteur invoque sa bonne foi pour échapper à une condamnation financière, d'autant plus lorsque son activité est simplement du négoce. Cette croyance est malheureusement erronée, comme l'illustre un jugement du 27 novembre 2009 rendu par le Tribunal de grande instance de Paris .

En l'espèce, la société Leroy Merlin est assignée en contrefaçon de brevet par une société Moulages Plastiques du Midi. Leroy Merlin ne conteste pas la validité du brevet, mais seulement sa contrefaçon. Elle excipe de sa bonne foi pour échapper à la contrefaçon, compte tenu de son activité nécessitant la gestion d'un nombre de références produits considérables.

Le Tribunal écarte l'argument dans les termes suivants : « attendu que cette description suffit à démontrer que les boîtiers de connexion reproduisent [les revendications du brevet] et en constituent la contrefaçon, la bonne foi invoquée par la société Leroy Merlin France, à la supposer établie, étant inopérante en la matière. »

Ainsi, dans un arrêt du 27 juin 2017, la Cour d’appel de Paris prend également cette position. En l’espèce, la société Vorwerk a fait assigner deux sociétés en contrefaçon de son brevet. Ces dernières tentent de s'exonérer de toute responsabilité en invoquant leur bonne foi, cependant la Cour d’appel de Paris rappelle qu'en matière de contrefaçon la bonne foi est inopérante devant les juridictions civiles, et déboute les deux sociétés de leurs demandes. La jurisprudence précédente qui dit que la bonne foi est inopérante en matière de contrefaçon de brevet reste donc constante. Cette position n'est guère surprenante : en effet, au sens de l'article 1382 du Code civil, il est constant en matière de responsabilité civile délictuelle qu'une faute non intentionnelle puisse caractériser une faute délictuelle et engager la responsabilité civile de son auteur. La contrefaçon de brevet fondée sur la responsabilité civile délictuelle ne déroge pas à cette règle : l'intention est indifférente. C’est pourquoi devant le juge d’appel la société Leroy Merlin n’a pu échapper à une condamnation pour contrefaçon de brevet.

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Sources

(3) Art. L. 716-7 du CPI.
(4) Cour d’Appel de Paris 8 octobre 1997.
(5) TGI Paris, 3ème ch., 2ème sect., 27 novembre 2009, Moulages Plastiques du Midi c. Leroy Merlin France, n°07/08388.
Code civil        
Code de la propriété intellectuelle
https://www.sedlex.fr/brevets-en-france/mise-en-oeuvre-des-droits/les-actes-de-contrefacon/ #la_fabrication

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