SELFIE ET RESEAUX SOCIAUX
/ Mars 2024 /
Le « selfie » représente la réalisation d’un autoportrait photographique avec l’aide d’un « smartphone ». Phénomène grandissant, il s’accompagne la grande majorité du temps de la publication de la photographie sur les réseaux sociaux. Cela pose des problèmes tant quant au droit à l’image que quant au droit d’auteur.
Le « selfie » est l’un des grands phénomènes de mode de la révolution numérique. Il consiste à se prendre en photo à bout de bras afin de réaliser un autoportrait.
L’autoportrait pris à bout de bras avec son smartphone ou
sa tablette est devenu un rituel incontournable. Mais ce phénomène apparemment
inoffensif se révèle aussi néfaste tant au regard du droit à l’image qu’au droit
d’auteur
Comme le définit le Larousse, le « selfie » est un « autoportrait photographique, généralement réalisé avec un téléphone intelligent et destiné à être publié sur les réseaux sociaux ». Il est d’ailleurs assez curieux et intéressant de savoir que la pratique, au Québec, s’intitule « égoportrait ».
Pourtant, le « selfie » est bien plus vieux qu’Internet ou les smartphones. En effet, il apparaît dès le début du XXème siècle, où même la grande-duchesse Anastasia Nikolaïevna se prend en photo devant son miroir en 1914. Le « selfie » traversera le siècle - une fameuse série d’autoportraits a été réalisée par les Beatles par exemple - jusqu’à exploser à l’ère d’Internet.
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En effet, la popularisation d’Internet au milieu des années 2000, et donc des réseaux sociaux, s’est effectuée en même temps que l’apparition des premiers « Smartphones », téléphones cellulaires dotés d’un appareil photo et utilisant des applications diverses.
Aujourd’hui, c’est toute une industrie, une économie qui se développe autour du seul « selfie ». Beaucoup de « start-up » Californiennes en font l’élément central de leur succès. On connaît l’exemple de l’application « Instagram », réseau social promouvant le « selfie », qui a été acheté au prix d’un milliard de dollars par le site Facebook, ou encore la réussite exponentielle de l’application « Snapchat ».
Le « selfie » est aussi devenu un objet de communication répandu, autant en politique que chez les personnalités médiatiques. Il a donc une valeur économique, culturelle, mais aussi juridique.
On se souvient notamment du selfie d’Ellen Degeneres en 2014, qui réunissait de nombreuses célébrités comme Brad Pitt, Angelina Jolie, Julia Roberts ou encore Meryl Streep sur une seule photo, devenant par la suite la plus « retweetée » de l’Histoire. Il a donc une valeur économique et culturelle. Ceci étant, le selfie a aussi une valeur juridique.
En effet, le « selfie » posté sur les réseaux sociaux pose forcément des problèmes de droit à l’image. Si un autoportrait est réalisé avec deux personnes, doit-il y avoir consentement des deux personnes ?
De manière symbolique, la CNIL rappelle d’ailleurs régulièrement dans ses communiqués les risques liés à la publication de telles photos sur les réseaux sociaux, et notamment les photos d’enfants, qui peuvent être détournées et se retrouver sur des sites illégaux.
L’exemple du « selfie » pris aux Oscars en 2014 est lui aussi un casse-tête juridique. Celui-ci, s'il est réputé comme étant le « selfie » le plus connu du monde, aurait pu se poser la question de l’auteur de la photo : était-ce Ellen DeGeneres, propriétaire du téléphone ? Bradley Cooper, celui qui a déclenché l’appareil photo ? Ou encore Samsung, l’entreprise qui avait commandé la photo ?
Un autre exemple : celui du cliché de « naruto », un singe ayant subtilisé le téléphone d’un touriste pour finalement se prendre en « selfie », la photo ayant fait le tour du monde par la suite. La PETA porte dès lors plainte contre le propriétaire du téléphone, en arguant que le singe avait les droits d’auteur de la photo, tandis que le propriétaire du téléphone avait fait valoir que le cliché avait été pris « sans intention réelle », excluant un tel droit.
Pour la petite histoire, un compromis a finalement été trouvé par les parties, et le singe touchera indirectement 25 % des revenus du cliché, qui seront reversés aux organismes en charge de son habitat.
Cependant la Cour d’appel américaine a fini par trancher, au sens qu’un animal ne peut pas être l’auteur d’un selfie, seul peut l’être un humain.
On comprend donc vite que le « selfie » pose des problèmes juridiques de différents ordres, et atteint particulièrement le droit à l’image, mais aussi la propriété intellectuelle. De plus, les interrogations sur le « selfie » sont ancrées dans l’actualité, non seulement car c’est un phénomène qui semble perdurer, mais, car en plus le projet de loi « République Numérique » porté par la secrétaire d’État chargée du Numérique Axelle Lemaire le prend en considération de manière directe ou détournée.
I. « Selfie » et propriété intellectuelle
A. La question de l’auteur du « selfie"
Il convient de rappeler que le Code de la Propriété intellectuelle protège « toutes les oeuvres de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination » (art. L.112-1). Le « selfie », en tant que photographie, n’a pas besoin d’être artistique ou informatif pour être protégé : il l’est par sa simple originalité. L’article suivant insère d’ailleurs dans la liste des oeuvres protégées les « oeuvres photographiques et celles réalisées à l'aide de techniques analogues à la photographie » (L.112-2).
Alors, si le « selfie » est une oeuvre, c’est nécessairement qu’elle a un auteur .
Une première affaire célèbre date de 2011. Un singe avait volé l’appareil photo d’un photographe, et avait appuyé sur le déclencheur, se prenant en « selfie ». Wikipédia, l’encyclopédie en ligne, avait alors utilisé une des photos prises par le singe pour illustrer son article sur le « selfie », considérant qu’elle était libre de droits. Le photographe, lui, considérait qu’il en était l’auteur, ce que rejeta la juridiction américaine. Plus tard, l’association PETA argua que le singe était l’auteur, ce qui fut aussi rejeté.
Olivier Pignatari, Docteur en droit et avocat, se pose la question de savoir quelle serait la solution en droit français dans son article « Le « selfie » d'un singe saisi par le droit ».
Comme aux États-Unis, le singe ne saurait être l’auteur de la photo. Il en serait ainsi de n’importe quelle autre oeuvre. En effet, la qualification d’« oeuvre de l’esprit » suppose son « originalité », définie généralement comme étant l’empreinte de la personnalité de l’auteur. Il semble difficile que l’animal ait volontairement voulu témoigner sa personnalité. Même en admettant cette hypothèse, il lui reviendrait en pratique de rapporter la preuve de l’originalité de l’oeuvre, ce qui paraît compliqué.
D’autant plus, que la Cour d’appel américaine a été claire sur le sujet et prive le singe de tous droits de propriété intellectuelle, le macaque ne peut pas être l’auteur du selfie. Les textes du Copyright Act ainsi que la jurisprudence en vigueur se référent exclusivement à des auteurs-personnes humaines.
La solution qui a été retenue aurait été la même devant une juridiction française, qui considère que l’originalité implique la personnalité de son auteur, or les animaux sont dépourvus d’une personnalité juridique. Cette exigence d’une intervention humaine signifie ainsi que le selfie est dépourvu de droits de copyright/auteur, qui ne peuvent être revendiqués ni par le singe ni par le propriétaire de l’appareil photo.
Quant au photographe, la propriété de l’appareil photo ne lui confère pas la paternité de l’oeuvre. Tout au plus, il pourrait demander à Wikipédia une indemnisation sur le fondement du nouvel article 1240 du Code civil (anciennement 1382).
On pourrait aussi se poser la question de la paternité du « selfie » pris aux Oscars en 2014. Ainsi, Samsung avait commandé un « selfie » dans le but de promouvoir un téléphone à une présentatrice de télévision américaine. Celle-ci confia son téléphone à un acteur, Bradley Cooper, qui prit la photo avec une dizaine d’acteurs et d’actrices.
Si Samsung n’avait sûrement qu’un droit patrimonial sur ce « selfie », le droit de l’exploiter économiquement donc, la question de l’auteur est plus épineuse. Est-ce Bradley Cooper qui a pris la photo ou Ellen DeGeneres qui a eu l’idée de la photo, et qui est propriétaire de l’appareil ?
L’arrêt « Painer » rendu en 2011 par la Cour de Justice de l’Union européenne détermine l’originalité à travers plusieurs critères : le choix de la mise en scène, de la personne à photographier, le cadrage, l’angle de prise de vue … Ces critères peuvent s’appliquer tant à Cooper qu’à DeGeneres. La question ne s’est à l’époque pas posée, mais montre bien la complexité nouvelle qu’apporte la mode des « selfies » dans notre droit, d’autant plus face à l’essor des réseaux sociaux.
B. « Selfie » et immeubles protégés
Ainsi qu’on l’a rappelé en introduction, les nouveaux réseaux sociaux comme « Snapchat » ou « Instagram » se développent autour de la photographie, mais surtout autour du « selfie ». La nouvelle mode est de poster des autoportraits dans diverses situations, divers endroits sur ces plateformes.
Cependant, si une de ces photographies est prise devant un immeuble, il y a de fortes chances que celui-ci soit considéré comme une oeuvre et qu’il soit encore protégé par le droit d’auteur. L’article L.112-2 du CPI protège en effet les « Les plans, croquis et ouvrages plastiques relatifs à la géographie, à la topographie, à l'architecture et aux sciences », donc les immeubles. Aussi, le droit d’auteur protège l’oeuvre pendant toute la vie de l’auteur, et pendant 70 ans après sa mort (L.123-1 CPI).
Si on peut trouver quelques immeubles qui ne sont plus protégés (Notre-Dame de Paris, Musée du Louvre …), certaines de nos plus célèbres constructions, comme la Philharmonie de Paris, ne sont pas encore dans le domaine public. Dès lors, chaque utilisation publique de l’oeuvre est censée être soumise à autorisation de l’auteur ou de ses ayants droit. La plupart des touristes qui se prennent en photo devant ces bâtiments datant du début du XXème siècle sont donc considérés par le droit français comme des contrefacteurs, dès lors qu’ils les postent sur les réseaux sociaux.
Sur ce point, le droit français parait tout à fait anachronique, et assez peu efficace : aucune réclamation n’a été portée par Jean Nouvel pour contester la publication d’un « selfie » sur un réseau social. C’est pourquoi le projet de loi « République Numérique », porté par la secrétaire d’État chargée du Numérique Axelle Lemaire, cherche à introduire la « Liberté de Panorama », déjà en oeuvre dans 80% des États membres de l’Union européenne, permettant de reproduire sur internet une oeuvre se situant dans l’espace public. Cependant, cette loi précise que l’usage doit être à but « non lucratif ».
Certains auteurs s’inquiètent de l’efficacité de cette loi, car on peut considérer comme lucrative à peu près chaque utilisation sur Internet : la charte de Facebook permet par exemple à ce site internet d’utiliser nos photographies de manière commerciale.
Il semble cependant probable qu’une fois cette loi votée, et qu’une réclamation est portée devant la Cour de cassation, que cette dernière estime que la publication d’un « selfie » comportant un immeuble protégé sur Facebook n’a pas une « fin commerciale », malgré l’existence de cette charte.
En effet, devant la complexité de la mise en oeuvre d’une telle législation, la Cour Suprême américaine a adopté la doctrine du « Fair Use » qui ne sanctionne pas la publication de la photographie d’une oeuvre sur les réseaux sociaux. Il semble évident que la Cour de cassation l’imitera.
Les doutes ont été levé par l'article 39 de la loi pour une
République numérique qui a permis de compléter l'article 122-5 du Code de la
propriété intellectuelle afin de préciser dans quelle mesure une œuvre peut être
reproduite.
Promulguée le 8 octobre 2016 la loi pour une République
numérique apporte de nouvelles précisons sur la liberté de panorama. Elle
stipule ainsi que l'auteur d'œuvres architecturales ne peut en interdire les
reproductions et représentations, uniquement si elles sont réalisées par des
personnes physiques à l'exclusion de tout usage à caractère commercial.
Concrètement, il est désormais permis pour les seuls
particuliers et dans un usage dénué de tout caractère commercial de
diffuser en ligne son selfie devant
une œuvre architecturale sans obtenir l'accord préalable de son auteur ou de ses
ayants-droits.
Si certains auteurs s’inquiétaient de l’efficacité de cette
loi, en raison de la charte de
Facebook par exemple qui lui permet
d’utiliser nos photographies de manière commerciale, la diffusion sans
autorisation de la photographie d'une œuvre architecturale protégée sur des
portails commerciaux ou hébergeant de la publicité, notamment les réseaux
sociaux, reste en principe interdite. Malgré tout il reste encore à prouver
l’effectivité de cette interdiction…
Par ailleurs, cette liberté concerne également les
sculptures et les installations publiques, qui sont considérés comme faisant
partie du patrimoine culturel et visuel accessible à tous.
Les œuvres d'art contemporain, les installations
temporaires et les monuments historiques ne sont pas couverts par cette liberté
et nécessitent l'autorisation préalable de leurs auteurs ou de leurs ayants
droit.
Toutefois, les modalités d'application de cette liberté varient selon les pays.
II. « Selfies » et droit à l’image
A. « Selfies » de groupe et consentement au droit à l’image
Le « selfie » est une photographie, il est donc naturellement protégé par le droit à l’image .
Le droit à l’image découle de l’article 9 du Code civil, qui fonde le droit à la vie privée.
Il est notamment consacré à l’article 226-1 du Code pénal, qui punit d’un an d’emprisonnement ainsi que de 45.000 euros d’amende le fait d’utiliser l’image d’un individu sans son autorisation.
Ainsi, quand le « selfie » n’utilise l’image que d’une seule personne, la question du droit à l’image ne se pose pas quand elle est postée sur un réseau social.
C’est quand une pluralité de personne apparaît sur la photo - ou « selfie de groupe » - que la question mérite d’être posée. Il faut en effet le consentement de chaque personne du groupe pour publier la photographie sur Internet.
Le consentement est tacite pour le droit à l’image : on considère qu’on ne prend en photo pas les gens au hasard, d’autant plus quand il s’agit d’un autoportrait de groupe. Cependant, ce consentement s’étend-il à la publication de l’image sur les réseaux sociaux ? Ces deux droits sont distincts, et donc les consentements aussi.
Ce problème a notamment été illustré par le « selfie » pris dans un avion par le danseur Brahim Zaibat, aux côtés de Jean-Marie Le Pen endormi. Le danseur l’avait posté sur le réseau social « Twitter », et Jean-Marie Le Pen avait saisi le juge des référés considérant que cette publication violait son droit à la vie privée et à l’image.
Encore une fois, ici il y a peu de contentieux. À part le dernier cas, le « selfie » dans notre ère implique souvent autant la prise de la photographie que sa publication sur les réseaux sociaux, et donc le consentement semble être souvent tacite. De plus, le « selfie » est souvent réalisé avec des proches, et donc si le consentement n’était pas tacite, le problème sera la plupart du temps réglé à l’amiable. La seconde personne dispose néanmoins de son droit à l’image et pourrait s’en prévaloir devant un juge, il est donc recommandé de demander l’autorisation de poster le « selfie » de groupe à chacun des individus présents sur ladite photographie.
De cette application est née la protection relative à la
pornodivulgation, introduite dans le Code pénal à la suite de la promulgation de
la loi pour une République numérique du 7 octobre 2016. La
pornodivulgation consiste à publier sur internet des images ou des vidéos
pornographiques de son ancien compagnon souvent après une rupture amoureuse.
Cette pratique constitue à présent un délit sévèrement
sanctionné. Désormais condamné par l’article 226-2-1 du Code pénal, le
Revenge porn n’a pas toujours fait
l’objet de sanction par les juridictions pénales.
Dans un arrêt rendu le 16 mars 2016, la chambre criminelle
de la Cour de cassation refusait, en vertu de l’article 111-4 du Code pénal, de
procéder à une interprétation extensive de la loi pénale.
La Cour d’appel avait relevé que le fait d’avoir accepté
d’être photographiée ne signifie pas, compte tenu du caractère intime de la
photographie, que la personne avait donné son accord pour que celle-ci soit
diffusée.
La Cour de cassation a cassé l’arrêt au motif que « n’est
pas pénalement réprimé le fait de diffuser, sans son accord, l’image d’une
personne réalisée dans un lieu privé avec son consentement. »
Le fait de porter à la connaissance du public ou d’un tiers
l’image d’une personne se trouvant dans un lieu privé n’était punissable que si
la captation avait été réalisée sans le consentement de la personne concernée.
Or, la photo intime est souvent prise, ou obtenue avec le
consentement de la personne concernée, mais diffusée sans son accord, et ceci
pour lui nuire. Cette interprétation stricte de la loi pénale avait
particulièrement remué le monde politique, ce qui avait conduit quelques mois
après à l’adoption de la loi pour une République numérique.
B. « Selfies » et image de marque
La marque de représentation graphique servant à distinguer les produits ou services d'une personne physique ou morale ». Elle comprend donc autant les signes figuratifs (logos …), que les mots (Nike, Apple, Ikea, Carrefour …).
Une marque peut dès lors être représentée dans un « selfie », par son logo ou son nom, sur le fondement du droit à l’image peut demander réparation si ce « selfie » porte préjudice à la marque.
Cependant, une des principales limites au droit des marques est l’utilisation de la marque sans son accord quand c’est dans un but « non commercial ». La Cour de Justice de l’Union européenne précise avec l’expression « lorsque ce n’est pas dans la vie des affaires ».
Ainsi, de la même façon que pour les immeubles, il semble évident que les « selfies » postées sur les réseaux sociaux comportant une marque pourront être publiées sans l’autorisation de la marque, car la doctrine du Fair Use américain considère que ça n’est pas un usage commercial, et que dans le cas des marques, la Cour de cassation a déjà reconnu pour des associations comme Greenpeace utilisant l’image de marque d’entreprises pour une campagne publicitaire de sensibilisation que ça n’était pas un usage commercial.
Bien que de ce principe est né la jurisprudence sur le Revenge Porn, qui est le fait de rendre publiques des images intimes d’un partenaire, obtenues initialement pour son seul usage personnel avec le consentement de la personne représentée, puis rendues publiques aux fins de nuire à celle-ci, généralement à la suite d’une séparation.
Bien que l’action sur le fondement de l’article 226-1 du Code pénal a été condamnée par l’arrêt de 2016, cela a permis l’introduction dans le Code pénal de l’article 226-2-1 condamnant une telle pratique. Une décision du TGI de Bobigny du 20 novembre 2018 avait également retenu que le revenge porn était une atteinte à la vie privée.
Cependant, une des principales limites au droit des marques
est l’utilisation de la marque sans son accord lorsque l’objectif poursuivi est
« non commercial ». La Cour de Justice de l’Union européenne précise ainsi que «
lorsque ce n’est pas dans la vie des affaires », le selfie est autorisé.
III. « Selfie » et interdictions
-
Interdiction de prendre des « selfies »
-
Festival de Cannes
Depuis 2018, il n’est plus question de prendre des selfies
sur le tapis rouge du Festival de Cannes. La raison : éviter un « désordre
intempestif » durant la montée des marches.
-
Les isoloirs
Est-ce autorisé de prendre un selfie dans l'isoloir au
moment de voter ? En France, il n'y a pas de règle explicite qui l'interdit,
mais il y a une condition importante à respecter : la photo ne doit en aucun cas
dévoiler le choix de votre vote. Bien que la prise de photo elle-même soit
légale, le vote secret est protégé par la Constitution. Par conséquent, il
existe une zone grise juridique concernant cette question. A titre d’exemple,
nos voisins britanniques appliquent une amende de plus de 6 000 euros en cas
d'infraction à la confidentialité du vote.
D'autres pays, tels que les Philippines et certains États
américains, interdisent strictement les selfies dans l'isoloir. Certains pays
vont même jusqu'à interdire l'utilisation de téléphones portables dans tout le
bureau de vote, car une photo pourrait être utilisée comme preuve de vote pour
soumettre certains électeurs à des pressions.
-
La tour Eiffel
Tombée dans le domaine public, notre très chère tour Eiffel
peut être prise et diffusée partout en plein jour. La nuit cependant, les choses
sont nettement différentes. En effet, une autorisation est nécessaire pour
toute publication, l'éclairage étant protégé au titre du droit d’auteur.
-
Les interdictions concernant les perches à selfies
Depuis 2015, les perches à "selfie", bras télescopiques qui
permettent de se prendre en photo avec du recul, sont interdites dans différents
lieux culturels, comme le château de Versailles.
En effet, la perche est considérée comme un danger, entre
les lustres et les objets précieux qui pourraient être détériorés. Enfin, le
risque concerne également les touristes, qui en utilisant leur perche à "selfie"
deviennent une proie facile pour les voleurs de portables.
A titre d’exemple le MoMa à New-York ou la National Gallery
à Londres ont également banni les perches à "selfie" de leurs allées.
Bien entendu ces interdictions ne dépendent pas d’un cadre
juridique légal en vigueur mais des règlements adoptés par les lieux culturels.
Il vous est donc conseillé de vous renseigner avant d’envisager de prendre votre
matériel.
Pour lire l'article "selfie" sur un téléphone mais en version courte, cliquer sur ce lien
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Sources :
- http://www.lexpress.fr/actualite/societe/justice/poster-un-selfie-devant-la-tour-eiffel-illuminee-est-illegal_1779362.html
- Olivier Pignatari, « Le « selfie » d’un singe saisi par le droit », 2014
- http://www.dreyfus.fr/nouvelles-technologies/le-casse-tete-juridique-du-selfie/
- Le Figaro Madame 2015, Article « Selfie »
- Northen District of California Naruto et al. v. Slater et al., case No. 15-cv-04324-WHO, 28 janv. 2016 et United States Court Of Appeals For The Ninth Circuit 23 avril 2018.
- TGI de Bobigny, ch.5/sec.3, jugement contentieux du 20 novembre 2018
https://www.legalis.net/jurisprudences/tgi-de-bobigny-ch-5sec-3-jugement-contentieux-du-20-novembre-2018/