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A-t-on le droit de photographier des inconnus dans la rue ?

À l’ère numérique, où les smartphones et les appareils photo sont devenus des extensions de notre quotidien, la photographie s’est intégrée de manière omniprésente dans nos vies.

Ce phénomène a transformé non seulement notre manière de capturer des moments, mais aussi notre rapport à l’image et à la vie privée. En effet, la photographie, qui autrefois était le domaine de quelques passionnés ou professionnels, est désormais accessible à tous, permettant à chacun de documenter sa vie et celle des autres à chaque instant.

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Cette démocratisation de la photographie soulève des questions juridiques et éthiques, notamment lorsqu’il s’agit de prendre des clichés d’inconnus dans la rue. Dans ce contexte, le droit à l’image est un principe fondamental en France, protégeant la vie privée des individus contre toute exploitation non autorisée de leur image. Ce droit repose sur le respect de la dignité et de l’intégrité de chaque personne, affirmant ainsi qu’aucun individu ne peut être photographié puis exposé sans son accord. (1)

En vertu de l’article 9 du Code civil, qui garantit le respect de la vie privée, toute captation d’image d’une personne identifiable sans son consentement préalable constitue une atteinte potentielle à ce droit. Ce cadre légal, tout en permettant une certaine liberté de captation d’images dans des espaces publics, impose des restrictions quant à leur diffusion. (2)


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L’importance de cette problématique est d’autant plus marquée dans un monde où les réseaux sociaux et les plateformes numériques facilitent la diffusion instantanée d’images à une échelle mondiale. Les conséquences d’une violation du droit à l’image peuvent être graves, tant sur le plan juridique que sur le plan éthique.

Il est donc essentiel d’explorer les contours de cette réglementation afin de comprendre dans quelles conditions il est permis de photographier des inconnus, et quelles conséquences peuvent découler d’une atteinte à ce droit.

Nous nous attacherons à examiner dans un premier temps les principes juridiques régissant le droit à l’image, en analysant sa définition, sa portée, ainsi que les limites et conséquences d’une atteinte à ce droit.

Dans un second temps, nous nous pencherons sur les modalités d’obtention d’une autorisation pour photographier des inconnus, ainsi que sur les exceptions à ce droit qui peuvent exister dans certaines situations. En somme, cette étude vise à éclairer les photographes amateurs et professionnels sur les règles à respecter lorsqu’ils s’engagent dans la pratique de la photographie de rue, tout en mettant en lumière l’importance de respecter la vie privée et les droits des individus photographiés.

I. Le droit à l’image : principes et implications juridiques

A. Définition et portée du droit à l’image

Le droit à l’image est un concept juridique qui trouve ses racines dans le respect de la vie privée, un droit fondamental en France. Selon l’article 9 du Code civil, « Chacun a droit au respect de sa vie privée ».

Ce droit s’étend à la protection de l’image d’une personne, lui conférant un contrôle exclusif sur l’utilisation et la diffusion de celle-ci. La jurisprudence a précisé que toute personne identifiable, c’est-à-dire dont l’image permet de la reconnaître, bénéficie de cette protection.

Ainsi, la simple captation d’une image dans un lieu public ne suffit pas à autoriser sa diffusion, surtout si cette diffusion peut porter atteinte à la dignité ou à l’intégrité de la personne photographiée. Le droit à l’image en France se distingue par son approche stricte. (3)

Contrairement à d’autres pays, où la captation d’images dans des lieux publics peut être plus tolérée, le législateur français a choisi de protéger de manière rigoureuse la vie privée des individus. Par conséquent, toute photographie d’une personne identifiable sans son consentement préalable peut engager la responsabilité civile du photographe, qui peut être contraint à des réparations pour le préjudice subi par la victime. Cette protection est d’autant plus pertinente à une époque où les images peuvent être diffusées sur des plateformes numériques, touchant un public potentiellement très large.

Il convient également de noter que le droit à l’image ne se limite pas à la photographie. Il s’étend également à d’autres formes de reproduction, telles que les vidéos, les illustrations et même les représentations artistiques. Par conséquent, les artistes et les créateurs doivent être particulièrement vigilants lorsqu’ils utilisent des images de personnes identifiables dans leur travail.

B. Limites et conséquences d’une atteinte au droit à l’image

La captation d’images d’inconnus dans des lieux publics, bien qu’elle soit souvent perçue comme une pratique banale, comporte des risques juridiques non négligeables.

  1. Les limites du droit à l’image

Bien que le droit à l’image soit un principe fondamental, il existe certaines exceptions qui permettent une captation et une diffusion d’images sans le consentement préalable de la personne photographiée. Ces exceptions sont généralement liées à des intérêts publics ou à des contextes spécifiques :

Les lieux publics et le droit à l’information : Dans les espaces publics, la captation d’images est souvent permise, notamment dans le cadre d’événements d’intérêt général (manifestations, cérémonies, etc.). Cependant, même dans ces cas, la diffusion de ces images peut être soumise à des conditions strictes. Par exemple, la diffusion d’une image prise lors d’un événement public ne doit pas dénaturer le propos ou porter atteinte à la réputation des personnes présentes.

Les personnes publiques : Les personnalités publiques, telles que les politiciens, les artistes ou les sportifs, bénéficient d’une protection moins stricte de leur droit à l’image. En effet, leur statut entraîne une certaine forme de renonciation à ce droit lorsqu’ils apparaissent dans des contextes liés à leur activité professionnelle.

Toutefois, cela ne signifie pas qu’ils sont dépourvus de droits ; toute exploitation commerciale de leur image nécessite souvent une autorisation.

L’usage artistique : Dans le cadre de la création artistique, certaines œuvres peuvent utiliser des images de personnes identifiables sans leur consentement, à condition que l’œuvre ait un caractère artistique et ne porte pas atteinte à la dignité de la personne représentée. Cette notion est cependant sujette à interprétation et peut donner lieu à des litiges.

  1. Les conséquences d’une atteinte au droit à l’image

Les conséquences d’une atteinte au droit à l’image peuvent être à la fois civiles et pénales :

Responsabilité civile : Lorsqu’une personne estime que son droit à l’image a été violé, elle peut engager une action en justice contre le photographe. Si le tribunal juge que l’image a été captée ou diffusée sans consentement, le photographe peut être condamné à verser des dommages et intérêts à la victime. Le montant de ces indemnités varie en fonction de la gravité de l’atteinte et des préjudices subis.

Injonction de cesser la diffusion : En plus des dommages et intérêts, le tribunal peut également ordonner le retrait de l’image diffusée ou sa suppression sur les plateformes numériques. Cela peut avoir des conséquences importantes pour les photographes qui partagent leurs œuvres en ligne, car la possibilité de retirer une image peut être complexe et parfois coûteuse.

Poursuites pénales : Dans certaines circonstances, une atteinte au droit à l’image peut également entraîner des poursuites pénales. Par exemple, si la captation d’image s’accompagne de harcèlement ou d’autres comportements illégaux, le photographe peut faire face à des accusations criminelles. Les sanctions peuvent inclure des amendes et, dans des cas graves, des peines d’emprisonnement.

  1. Responsabilité éthique et sociale

Au-delà des implications juridiques, il est essentiel de considérer la dimension éthique de la photographie de rue. Les photographes doivent respecter la dignité des personnes qu’ils capturent, en prenant conscience de l’impact que leurs images peuvent avoir sur la vie des sujets photographiés. La responsabilité sociale des photographes implique de réfléchir à la manière dont leurs œuvres contribuent à la représentation des individus dans l’espace public et à la manière dont elles peuvent influencer l’image que la société se fait d’eux.

II. Autorisation et exceptions au droit à l’image

A. Modalités d’obtention d’une autorisation

Respecter le droit à l’image nécessite une approche proactive de la part des photographes.

Obtenir le consentement explicite des personnes photographiées est non seulement une obligation légale, mais également une question d’éthique et de respect. (4) Voici un développement détaillé sur les modalités d’obtention d’une autorisation.

  1. Importance du consentement

Le consentement est au cœur du droit à l’image. Sans une autorisation claire, l’utilisation d’une photographie peut constituer une violation des droits de la personne, exposant le photographe à des poursuites judiciaires.

Le consentement doit être :

Éclairé : Les personnes doivent être informées de la finalité de la prise de vue et de l’usage qui sera fait de leur image. Cela inclut la mention de tout support de diffusion, que ce soit un site web, un réseau social, une exposition, ou un projet commercial.

Libre : Le consentement ne doit pas être obtenu sous la contrainte ou la pression. Les sujets doivent avoir la possibilité de refuser sans aucune conséquence négative.

Précis : L’autorisation doit concerner une utilisation spécifique de l’image. Par exemple, si l’image est destinée à un usage commercial, cela doit être clairement stipulé.

  1. Formulaire de consentement

Pour formaliser le processus d’obtention du consentement, l’utilisation d’un formulaire est fortement recommandée. Ce formulaire doit contenir plusieurs éléments essentiels :

Identité du photographe : Inclure les coordonnées du photographe ou de l’entité qui réalise la prise de vue.

Description de l’image : Préciser le type d’image qui sera capté (individuelle, de groupe, événement, etc.).

Usage prévu : Indiquer clairement comment l’image sera utilisée, que ce soit pour des publications, des réseaux sociaux, des campagnes publicitaires, etc.

Droit de retrait : Mentionner que le consentement peut être retiré à tout moment et expliquer les modalités de ce retrait.

Signature : Obtenir la signature de la personne concernée, idéalement en incluant une date, pour attester de l’accord.

  1. Prises de vue de groupes

Dans le cadre de prises de vue de groupes, la question du consentement devient plus complexe. Bien que le consentement individuel ne soit pas nécessaire dans certains cas, il est prudent de :

–  Informer le groupe : avertir les personnes que des photographies seront prises et qu’elles pourraient être publiées.

Obtenir des consentements : dans la mesure du possible, solliciter le consentement de chaque individu, surtout si l’image est destinée à un usage commercial ou à une diffusion large.

Respecter les refus : Si une ou plusieurs personnes expriment leur souhait de ne pas être photographiées, leurs souhaits doivent être respectés.

  1. Conséquences d’un non-respect

Le non-respect du droit à l’image peut entraîner des conséquences juridiques importantes. Les photographes qui utilisent des images sans consentement peuvent être confrontés à des actions en justice, à des demandes de dommages et intérêts, et à la nécessité de retirer les images de la circulation. Il est donc crucial d’intégrer le processus d’obtention d’autorisation dans la pratique quotidienne de la photographie.

B. Exceptions au droit à l’image

Malgré l’importance du droit à l’image, certaines circonstances permettent de déroger à son application stricte. Voici un examen approfondi des exceptions au droit à l’image.

  1. Événements publics

Les événements publics, tels que les manifestations, les concerts, et les spectacles, constituent des contextes où le droit à l’image peut être assoupli. Dans ces situations :

Personnes comme éléments accessoires : Les individus présents à un événement public peuvent être considérés comme des éléments accessoires à l’événement lui-même. Ainsi, la captation d’images peut être perçue comme légitime tant que l’image ne dénature pas le propos de l’événement.

Intérêt public : La diffusion d’images d’événements publics peut être justifiée par l’intérêt public à informer ou à documenter. Cela inclut la couverture médiatique de manifestations politiques, d’événements culturels, ou de situations d’actualité.

Précautions : Toutefois, même dans ces circonstances, la prudence est de mise. Les photographes doivent veiller à ne pas porter atteinte

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Sources :

Cet article a été rédigé pour offrir des informations utiles, des conseils juridiques pour une utilisation personnelle, ou professionnelle. Il est mis à jour régulièrement, dans la mesure du possible, les lois évoluant régulièrement. Le cabinet ne peut donc être responsable de toute péremption ou de toute erreur juridique dans les articles du site. Mais chaque cas est unique. Si vous avez une question précise à poser au cabinet d’avocats, dont vous ne trouvez pas la réponse sur le site, vous pouvez nous téléphoner au 01 43 37 75 63.

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